Parlons peu parlons miam.
On sait qu’à la Renaissance, l’Europe a été bouleversée par des changements très importants. Certes. Mais ce qu’on sait moins c’est que ces changements ont atteint des domaines qui nous paraissent aujourd’hui anecdotiques, dont celui de la cuisine.
La Symbolique des aliments
Pour que tu comprennes la lente transition entre les habitudes culinaires du Moyen-Âge et celles de la Renaissance, il faut te situer un peu le contexte. En fait, au Moyen-Âge, on avait trop de principes : on consommait les aliments principalement en rapport avec leur symbolique.
Je m’explique.
Tu vois les 4 éléments ?
Au Moyen-Âge, l’Air était le plus haut placé dans la hiérarchie des éléments, alors on méprisait tout ce qui avait à avoir avec la Terre. Ce qui explique que les nobles refusaient de manger des viandes dites « de boucherie » qui vivaient dans la terre et la boue, et leur préféraient la volaille et surtout les grands oiseaux (ouais, on mangeait de la cigogne et du héron, au Moyen-Âge) qui évoluaient dans l’élément air et qui, en volant, se rapprochaient de Dieu.
Même chose pour les fruits et légumes : avant la Renaissance, les nobles ne mangeaient quasiment pas de légumes parce qu’ils poussent dans la terre alors qu’ils consommaient pas mal de fruits puisque le fruit c’est cool, ça pousse dans les arbres, et les arbres ça pousse vers le ciel, donc vers Dieu. On mangeait des fruits, donc, mais on se méfiait quand même un peu des melons et des fraises qui poussaient un peu trop près de la terre à leur goût. Ca cogitait pas mal.
Et qui cogitaient ? Les médecins.
Les nobles avaient une confiance aveugle en leurs médecins qui décidaient si tel ou tel aliment était bon pour leurs petits estomacs fragiles. Par exemple ils disaient que la viande rouge était trop difficile à digérer pour leurs petits estomacs, alors on la laissait aux paysans, parce qu’on s’en foutait un peu des estomacs des paysans.
Evolution
Tout ça jusqu’au jour où la population a commencé à augmenter sévèrement aux abords de la Renaissance, justement. Pour palier, les paysans ont dû transformer les terres de pâture en plants de céréales, et ont donc arrêté de manger de la viande au profit de plus de blé ou que sais-je.
Dans un pur esprit de contradiction bien bourgeois, les nobles ont alors décidé que c’était devenu cool de manger de la viande de boucherie. Peu importe les avis des médecins, à force d’expérimenter avec de nouveaux aliments, les aristocrates se sont rendus compte que ça ne leur faisait strictement aucun mal de manger un petit morceau de boeuf.
Les fruits en dessert
Puisqu’on n’écoutait plus tellement l’avis des médecins, on a aussi commencé à se mettre à manger les fruits en dessert. Figure-toi qu’avant, on les mangeait en entrée, parce qu’on considérait qu’ils étaient trop longs à digérer et que c’était astucieux de les garder à mijoter dans l’estomac pendant tout le repas.
C’est d’ailleurs de cette tradition qu’on a gardé l’habitude de manger le melon en entrée. C’est un peu le seul survivant d’une longue lignée de fruits mangés en entrée.
L’Italie
Mais alors tu te demandes peut-être quel est l’impact de l’Italie dans tout ça ? Et bien ce sont les italiens qui ont apporté en France tout un tas de fruits et légumes aujourd’hui très communs mais qui étaient super exotiques à la Renaissance, tels le chou-fleur, l’artichaut, les oranges et les citrons ou encore les asperges.
Tu sais aussi que pour tout ce qui est art et architecture, les italiens ont puisé leur inspiration dans l’Antiquité, à la Renaissance ? Et bien ils l’ont aussi fait pour la nourriture. Ils ont retrouvé des livres de cuisine précisant les aliments appréciés par les nobles de la Rome Antique et les ont réhabilités et introduits ou réintroduits en France. Pas de chance pour nous, c’était souvent des trucs un peu dégueu comme les huitres ou les abats. Enfin c’est peut-être mieux que certains aliments qu’on a abandonnés à l’aube de la Renaissance, comme la langue de baleine par exemple…
Bon appétit à toi.
Peintures : Giuseppe Arcimboldo